Depuis trois décennies, l’Union européenne (UE) est périodiquement confrontée à des surprises stratégiques. Rien qu’au cours des six dernières années, elle a été secouée au moins trois fois : (1) en 2016, avec le Brexit et l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis, (2) en 2020, avec l’irruption de la pandémie du Covid, et (3) en 2022, avec l’agression russe contre l’Ukraine.

En remontant un peu plus loin dans le temps, d’autres perturbations systémiques pourraient être citées. De la fin de la Guerre froide aux Printemps arabes, en passant par les guerres balkaniques, l’irruption du terrorisme international ou la crise financière de 2008, les Européens semblent être destinés à changer d’« ère géopolitique », comme disent les experts, tous les six ou sept ans en moyenne.

Si l’adage selon lequel l’Union se construit crise après crise était vrai, la défense européenne devrait être une réalité consolidée depuis longtemps. L’expression semble donc quelque peu abusive. Où en est ce dossier aujourd’hui, à l’heure où la guerre en Ukraine bouscule une nouvelle fois les certitudes du Vieux Continent ?

Pour répondre à cette question, il convient d’établir une distinction entre, d’une part, la politique industrielle et capacitaire de l’UE et, d’autre part, la politique de défense à proprement parler, soit la capacité de l’Union à agir en tant qu’acteur politique intégré et autonome. Ces deux dimensions de la défense européenne, en effet, ont atteint un niveau d’intégration différent. Et leur bilan l’est tout autant.

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